Temps du Consultant et Temps du Management

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25/05/2018


Temps du Consultant et temps du management

L’ouvrage de Batsch (2002) sur le temps et les sciences de gestion met en évidence l’importance et la nécessité de prendre en compte la variable temps dans les pratiques managériales. Les pratiques d’amortissement comptable n’auraient ainsi aucun sens sans le temps et, l’instauration d’une relation de confiance entre différents acteurs organisationnels nécessite du temps.


Une analyse du temps du consultant et du management en place, et des implications qui résulteraient des différences temporelles n’est donc pas dénué d’intérêts. Elle permet de soulever des questions stratégiques quant à la valeur apportée par le consultant en management, lorsque cette valeur n’est pas analysée uniquement sous l’angle de l’acquisition d’une compétence inexistante en interne mais, également quant aux outils de gestion de perpétuation de l’apprentissage organisationnel.


Le consultant et les frontières organisationnelles

S’interroger sur la nature et l’identification des frontières organisationnelles revient à s’interroger directement ou indirectement sur l’appartenance ou non d’un élément à une organisation, sur l’apposition d’un qualificatif interne ou externe à cet élément.


Les travaux de Gosse, Sargis et Prismont (2001) tentent d’opérationnaliser les frontières de l’entreprise dans leurs travaux sur les stratégies d’externalisation. Dumez et Jeunemaitre (2010) montrent les perspectives multiples des frontières organisationnelles et l’intérêt d’analyser les pratiques managériales sous différents périmètres.


Sous un angle juridique, un consultant en mission appartiendrait ainsi exclusivement ou non à une organisation durant un temps déterminé en fonction du contenu du contrat.


Sous un angle physique, le consultant tout comme les autres membres de l’organisation, est un élément interne à l’organisation dès lors qu’il franchit les portes de l’entreprise et devient un élément externe à celle-ci lorsqu’il effectue la même opération mais, dans un sens inverse.


Cependant, l’analyse la plus intéressante se porte sur des frontières beaucoup moins évidentes et difficilement observables. Deux frontières immatérielles peuvent ainsi être évoquées :


  • L’implication du consultant dans les problèmes de management quotidien
  • La portée des décisions et l’apprentissage organisationnel

Le consultant en management au quotidien : Plutôt Fayolien ou Mintzbergien ?

Mintzberg (2006) décrit le travail du manager dans son ouvrage devenu aujourd’hui incontournable dans les écoles de gestion.


Sans contredire Fayol, il insiste cependant sur le fait que le travail du manager n’est pas limité aux tâches de la planification, de l’organisation, de la direction et du contrôle.


Mintzberg (2006) propose également un cadre d’analyse qui met en évidence la pression au quotidien des tâches et du temps sur le manager. Le consultant en executive management recruté pour une mission et pour une durée précise a un temps désancré des problèmes au quotidien. En ce sens, son temps est différent à celui du management classique où la stratégie s’inscrit plus dans le cadre théorique de Strategy as Practice.


La différence temporelle crée alors une valeur : La possibilité pour le consultant de se concentrer et de terminer dans un délai moindre la résolution d’un problème. Le recrutement du consultant en executive management est alors ici motivé par le raccourcissement du temps dans la gestion d’un projet plutôt que par l’acquisition d’une compétence spécifique.


En effet, le management classique dispose aussi dans ce schéma des compétences nécessaires à la gestion du projet. Mais la Strategy as Practice absorbe considérablement ses capacités à partir du moment où celui-ci doit quotidiennement faire lui-même une partie du pont entre l’opérationnel, la tactique et le stratégique.


Temps de la décision et de sa portée


Les cadres d’analyse en stratégie sont multiples. Dans son ouvrage sur l’avantage concurrentiel, Porter (1985) a mis beaucoup plus l’action sur l’analyse dans la définition des stratégies. D’autres auteurs adoptent la même approche dans l’analyse des stratégies : Les stratégies sont définies dès lors que des décisions sont prises quant aux grandes orientations de l’entreprise sur le long terme. La bonne stratégie serait ainsi la stratégie issue d’une bonne analyse.


L’intérêt croissant aux pratiques managériales de la gestion de la qualité totale dans les entreprises japonaises mais, également la mobilisation de la strategy as practice dans des travaux sur les stratégies d’entreprises réorientent la réflexion quant à la nécessité de s’intéresser sur la mise en œuvre des stratégies plutôt que de s’arrêter à leur définition.


A partir de ce moment, le poids de la réalisation est aussi, voire beaucoup plus, important que celui de la décision.


Le consultant en executive management en mission durant une période bien déterminée à l’avance, prend des décisions stratégiques qui engagent l’entreprise sur le long terme. Cependant, l’impact de ces décisions sur les pratiques au quotidien peuvent être supérieures au temps du consultant à l’intérieur des frontières mêmes de l’entreprise.


Dès outils de gestion (voir Hatchuel et Weil (1992) pour plus de précisions sur les outils de gestion), doivent être imaginés afin que cette différence temporelle ne soit pas destructrice de valeur. Ces outils de gestion doivent préparer la sortie du consultant en dehors des frontières juridiques de l’entreprise en essayant de codifier le plus de compétences possibles, que celui-ci apporte durant sa mission. Ces outils assurent la continuité de l’apprentissage organisationnel initié par le consultant, même après son départ, afin que les pratiques puissent se perpétuer et évoluer dans le sens attendu.